Si aucun texte spécifique n’impose la laïcité et la neutralité religieuse de la justice, celle-ci est soumise aux principes qui régissent les services publics et les institutions en France. L’objet de cette étude sera de voir comment la laïcité s’applique à la justice. Le sujet est d’autant plus intéressant que la justice n’est sans doute pas un service public comme les autres. Outre une laïcisation plus lente, la justice se distingue également des autres services publics par la diversité des acteurs qui s’y croisent : tous ne sont pas des professionnels (les jurés et les témoins notamment) et parmi les professionnels, tous ne sont pas agents publics (les avocats, les experts par exemple). Toutes ces personnes ne sont donc pas soumises aux mêmes règles. Il conviendra de voir si le principe de laïcité s’applique à tous. Le droit positif met-il à la charge de tous les acteurs de la justice (dans un sens qui comprend également les acteurs du procès) une obligation de laïcité et de neutralité religieuse ? La recherche fera apparaître également s’il existe des différences entre les juridictions et si ces différences résultent de règles de droit ou de pratiques susceptibles de varier en fonction du président de la juridiction.
Parmi ces acteurs enfin, certains sont amenés à trancher des questions d’ordre religieux qui les amènent souvent sur un terrain qui ne leur est pas familier. Or, ils ne peuvent pas s’abriter derrière leur neutralité pour ne pas répondre à la question soulevée par de tels litiges. A cet égard, il sera intéressant de voir comment ils appréhendent leur obligation de neutralité dans l’exercice de leur fonction, comment ils mettent en œuvre leur neutralité dans leur compréhension et leur traitement ou leur qualification du fait religieux.
Il s’agit donc de relever, dans le droit positif, quelles sont les obligations, en lien avec la laïcité, qui s’imposent aux acteurs de la justice et de s’arrêter plus longuement sur la neutralité des juges et plus précisément sur la manière dont ils mettent en œuvre cette obligation dans l’exercice de leurs fonctions. L’ensemble de ces questions recevra l’éclairage du droit comparé (droit américain, droit allemand), ce qui permettra d’apprécier le lien entre le régime des cultes et les obligations pesant sur les acteurs de la justice.
En fin de compte, cette étude devrait permettre de mieux évaluer la spécificité du service public de la justice. Cette recherche est réalisée avec le soutien de la mission de recherche « Droit et Justice ». Elle est menée sur deux années (2016-2018) par une équipe composées de quinze chercheurs, juristes et sociologues, sous la direction scientifique d’Elsa Forey et Yan Laidié, professeurs de droit public à l’Université de Bourgogne-Franche-Comté.
Présentation de l’équipe de recherche
Caroline Bugnon, Maître de conférences, UBFC
Arnaud Coutant, Maître de conférences, Université de Reims
Virginie Donier, Professeur, Université de Toulon
Derek El Zein, Avocat, Maître de conférences, Université Paris Descartes
Karen Fiorentino, Professeur, UBFC
Elsa Forey, Professeur, UBFC
Andrei Gaghi, Docteur en sociologie
Nicolas Gerbay, Maître de conférences, UBFC
Aurore Granero, Maître de conférences, UBFC
Armelle Guignier, Ingénieur de recherche contractuelle, UBFC
Hélène Hurpy, Maître de conférences, Université de Toulon
Philippe Icard, Maître de conférences, UBFC
Yan Laidié, Professeur, UBFC
Elina Lemaire, Maître de conférences, UBFC
Jean-Christophe Marcel, Professeur de sociologie, UBFC
Géraldine Maugain, Maître de conférences, UBFC
Jean-Pierre Sylvestre, Professeur de sociologie, UBFC
Marie-Suzel Tabard, Doctorante, UBFC
Sylvie Torcol, Maître de conférences, Université de Toulon